Le monotype : une estampe à découvrir 

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18 Jan 2023

Découvrons cette pratique par le prisme de la série Hot Sauce, dans laquelle Hamie Robitaille nous propose une si belle appropriation de la technique. 

De quoi parle-t-on ? 

L’estampe correspond généralement à une forme d’impression précédée par un minutieux travail de gravure, mais on oublie souvent que cette pratique ne s’y limite pas. Le monotype permet de retrouver ce processus créatif sans avoir à ciseler ni entailler quoi que ce soit. Il s’agit d’un tirage unique, obtenu par la pression du papier contre une plaque lisse (métal, plastique, verre…). De l’encre ou de la peinture peuvent être utilisées comme médium, et la création de l’oeuvre peut suivre deux processus : une pression manuelle ou mécanique sur le papier comprenant le motif (on parlera d’addition), ou le retrait du médium créant le motif par soustraction, sur une plaque entièrement recouverte.  

D’abord inventé par le graveur génois Giovanni Benetto Castiglione vers la fin du 17e siècle, le monotype est largement popularisé par les impressionnistes du 19e, avec Edgar Degas comme chef de file. Avec plus de 400 monotypes, le peintre français utilisera notamment la technique pour créer des fonds riches en couleurs, remplis de mouvements et de textures, qu’il sublimera par la suite au pastel. 

Le monotype au Livart : la série Hot Sauce, par Hamie Robitaille 

Si les œuvres des impressionnistes présentent une approche traditionnelle de la technique, le monotype a su évoluer vers une pratique contemporaine. C’est avec les œuvres de Hamie Robitaille, artiste multidisciplinaire montréalaise, que nous pouvons découvrir les interprétations récentes de la pratique.  

Mouvement libéré

Au premier regard, c’est une forme de mouvement continu et fluide qui transparaît dans ces œuvres. Omniprésent dans l’approche artistique de Hamie Robitaille, le mouvement dans le monotype semble direct et organique. Il fournit aussi un aperçu dynamique des interactions que l’artiste a pu avoir avec ses toiles, une chorégraphie transposée sur papier. Finalement, la possibilité de concevoir les œuvres de la série dans différents angles est une autre forme de mouvement rendue possible par le monotype.

Ci-contre : Hot Sauce 17.2 – Hamie Robitaille  

[Le monotype] fournit aussi un aperçu dynamique des interactions que l’artiste a pu avoir avec ses toiles, une chorégraphie transposée sur papier

Présence matérielle

Si l’utilisation d’une plaque lisse permet la création d’un motif net, faire varier les matériaux de la plaque permet l’apparition de textures spécifiques. C’est le cuivre qui a été choisi pour la série Hot Sauce, apportant cet aspect métallique à la peinture noire. L’utilisation d’une raclette, pour déplacer l’encre dans le cas de cette série, accentue l’aspect lisse et immaculé du cuivre. Le métal brun fait aussi  bénéficier l’œuvre de quelques imperfections texturées permettant une transformation du médium : l’encre est sublimée par les qualités du cuivre.

Ci-contre : Hot Sauce 13.2 – Hamie Robitaille

Nuances et variations

Au-delà du plan, le monotype apporte une multitude de variations de tons grâce à l’aspect matériel de la pratique. Les rapports clairs-obscurs et les textures que l’on retrouve dans la série sont obtenus par des variations de pression lors de l’application du motif, apportant richesse et profondeur à l’œuvre. Pour un monotype par addition, les points de pression visibles correspondent aux étapes de création de l’artiste, permettant lors de l’observation de retracer le processus créatif et de mieux le comprendre. 

Ci-contre : Hot Sauce 15 – Hamie Robitaille

Une technique à l’épreuve de la créativité 

Comme le montrent les œuvres de Hamie Robitaille, le monotype permet des envolées créatives à plusieurs niveaux : de l’outil à la plaque, en passant par le type d’encre ou l’ampleur des mouvements, la complexité de la création d’un monotype est accentuée par son caractère unique. Et l’œuvre comme ses motifs n’étant fixés que lors de l’impression, il est possible de s’exprimer jusqu’aux derniers instants de la production. Conçu il a plusieurs siècles, puis perçu au 19e siècle comme une réponse artistique à la photographie, le monotype est aujourd’hui encore méconnu malgré un potentiel artistique inépuisable.

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